Etre maître ou maîtresse de stage

Après le salariat, l’installation, la CARPIMKO et la recherche et le doctorat, la formation continue, l’exercice coordonné, la téléexpertise, l’exercice coordonné et l’accès direct lors des éditions précédentes, à travers 5 Ortho Focus, nous vous parlons du rôle des maîtres et maîtresses de stage.

L’ engagement à devenir maître ou maîtresse de stage peut être source de doutes, d’hésitations et de questions. Les centres de formation universitaire en orthophonie ou certaines associations de maîtres de stage peuvent vous accompagner dans votre parcours.

Cette série Ortho Focus vise à vous mettre le pied à l’étrier, car c’est grâce à votre implication que nous pourrons former davantage d’étudiants et d’étudiantes en orthophonie !

Les maîtresses et maîtres de stage jouent un rôle central dans le développement des compétences professionnelles et cliniques des étudiants et des étudiantes.

La formation initiale en orthophonie est enrichie de 2040 heures de stages durant le parcours universitaire.
Être maîtresse ou maître de stage, c’est transmettre des savoirs et former les futur·es orthophonistes, mais c’est aussi une opportunité complémentaire d’enrichir ses propres pratiques professionnelles..

👉 La fonction est encadrée par une réglementation précise :

ℹ️ Vous devez justifier d’au moins 3 années d’exercice ;

ℹ️ Chaque Centre de formation universitaire en orthophonie (CFUO) délivre son agrément, après validation par une commission (composée généralement du responsable ou de la responsable des stages, du responsable ou de la responsable pédagogique et d’enseignants et enseinantes) des documents demandés, comme ceux attestant d’une formation continue régulière, le curriculum vitae ou encore une copie du diplôme ;

ℹ️ Celui-ci est valable 3 ans, renouvelable sur demande ou par tacite reconduction.

La liste des maîtresses et maîtres de stage est généralement transmise aux étudiants et édudiantes qui prennent ensuite directement contact avec l’orthophoniste.

👉 Dans le cadre de l’exercice libéral, un maître ou une maîtresse de stage ne peut recevoir plus d’un ou une stagiaire à la fois. Le ou la stagiaire, après consentement du patient ou de la patiente, assiste aux activités du maître ou de la maîtresse de stage et participe, sous la responsabilité et en présence du maître ou de la maîtresse de stage, aux actes professionnels que ce dernier accomplit habituellement.

👉 L’étudiant ou l’étudiante ne peut percevoir aucune rémunération, ni de son maître ou de sa maîtresse de stage, ni des patient·es au titre de son activité de stagiaire. En effet, l’article L.4381-1 du code de la santé publique précise que « la réalisation de ces stages ne peut avoir pour objet ou pour effet d’accroître l’activité rémunérée de ces praticiens ». L’étudiant ou l’étudiante peut uniquement bénéficier d’une indemnisation liée aux contraintes engendrées par son stage, à l’exclusion de toute rémunération ou gratification au sens de l’article L.124-6 du code de l’éducation.

✅ Accompagner en assurant une fonction pédagogique et réflexive auprès de l’étudiant ou l’étudiante, ainsi qu’en lui permettant de faire le lien entre ses enseignements théoriques et les situations cliniques.

✅ Encadrer et transmettre en supervisant de manière directe ou indirecte, chacune des modalités apportant des objectifs et bénéfices précis.

Le stage se pratique sous supervision directe afin de favoriser une construction solide de sa posture professionnelle et nécessite la présence physique du maître ou de la maîtresse de stage pendant la réalisation d’une activité clinique lors :
➡️ des entretiens avec les patients, patientes ou leur entourage ;
➡️ des bilans orthophoniques ;
➡️ des séances de rééducation ;
➡️ des échanges interprofessionnels ou réunions d’équipe ;
➡️ de la préparation des interventions (réflexion conjointe entre l’étudiant ou l’étudiante stagiaire et le maître ou la maîtesse de stage).

➡️ d’observer les comportements professionnels de l’étudiant ou l’étudiante (posture, langage, attitude, gestion du temps, etc.) ;
➡️ d’évaluer la progression de ses compétences cliniques (élaboration du projet thérapeutique, adaptation des séances, gestion de l’alliance thérapeutique, etc.) ;
de proposer un feedback immédiat ou différé, ciblé sur les points d’amélioration et les points forts ;
➡️ de modéliser des attitudes et des pratiques professionnelles.

👉 La supervision indirecte peut être proposée sur une partie des séances avec une augmentation progressive lors des deux derniers semestres de la formation et correspond aux situations où l’étudiant ou l’étudiante exerce en autonomie, sans la présence immédiate du maître ou de la maîtresse de stage qui doit cependant rester disponible à proximité, favorisant ainsi un étayage différé :
➡️ discutant des objectifs thérapeutiques avant la séance ;
➡️ en analysant les séances menées a posteriori ;
➡️ en faisant un retour à l’étudiant ou l’étudiante concernant la séance qu’il ou elle aura préparée en autonomie ;
➡️ en corrigeant ensemble les comptes-rendus de bilans orthophoniques.

✅ favoriser la prise d’initiative et les ajustements de l’étudiant ou l’étudiante ;
✅ renforcer sa capacité d’auto-évaluation et son esprit critique ;
✅ l’amener à formuler de façon autonome des hypothèses cliniques et à construire un raisonnement clinique structuré ;
✅ accompagner l’étudiant ou l’étudiante vers une autonomie totale, tout en restant dans un cadre sécurisé.

Le maître ou la maîtresse de stage ne peut pas recevoir d’autres patients ou patientes pendant une supervision indirecte. Il ou elle n’est en revanche pas obligé·e de rester dans le bureau, tant qu’il ou elle reste dans les locaux et disponible à tout moment.

👉 Accueillir un étudiant ou une étudiante en stage ne se réduit pas à l’encadrement en orthophonie. Quand cela est possible, de nombreuses maîtresses et de nombreux maîtres de stage organisent un accueil interprofessionnel, permettant à l’étudiant ou l’étudiante de découvrir les champs d’intervention d’autres professionnel·les de santé (médecins, kinésithérapeutes, orthoptistes etc.). Ces échanges nourrissent la réflexion clinique du ou de la stagiaire et lui offrent une vision plus globale de la prise en soin du patient ou de la patiente.

✅ Planifier en début de stage les temps de supervision directe et indirecte, en les adaptant au fur et à mesure.
✅ Prendre connaissance ensemble des outils de suivi proposés par le centre de formation et les utiliser (grille d’observation, carnet de bord, fiche d’évaluation).
✅ Instaurer un climat de confiance, où le dialogue, les questions et les commentaires de chacun et chacune sont perçus comme des leviers d’apprentissage.
✅ Encourager la verbalisation : faire justifier à l’étudiant ou l’étudiante ses choix cliniques, expliciter et expliquer les nôtres.
✅ Encadrer l’autonomie : même en supervision indirecte, l’étudiant ou l’étudiante ne doit jamais être laissé·e seul·e face à une situation qu’il ou elle ne maîtrise pas ou qui soit éthiquement délicate.
✅ Réaliser un temps d’évaluation de mi-stage afin de permettre d’avoir une occasion planifiée de s’ajuster.

➡️ Le maître ou la maîtresse de stage doit accueillir l’étudiant ou l’étudiante en connaissant les objectifs du stage afin d’accompagner et d’évaluer le parcours et l’évolution de celui-ci, tout en suggérant les réajustements nécessaires.

➡️ En cas de questionnement sur le déroulé du stage, il est essentiel que le maître ou la maîtresse de stage puisse échanger avec le ou la responsable des stages du CFUO avant la fin de la période.

Certains étudiants et étudiantes peuvent relater un vécu difficile lié aux stages (cf. enquête menée par le FNEO en 2025). Ces périodes sont fréquemment marquées par du stress ou de l’auto-dévalorisation.

Pour une approche adaptée, le maître ou la maîtresse de stage doit avoir à l’esprit les éléments suivants :

➡️ Sentiment d’être exposé·e au jugement ;
➡️ Certaines situations cliniques peuvent être déstabilisantes et anxiogènes

➡️ Crainte de ne pas réussir l’alliance thérapeutique, de ne pas maîtriser suffisamment les connaissances théoriques, de ne pas réussir les actes les plus “techniques” (ex: passation d’épreuves de bilan standardisées).

👉 Adopter une posture bienveillante et un cadre clair et explicite dès le début, utiliser les principes du feed-back efficace:

👉 Descriptif et non jugeant;

👉Spécifique;

👉 Portant sur le comportement et non sur la personnalité;

👉 Bénéfique pour le ou la stagiaire;

👉 Visant à partager l’information;

👉 Limité dans son contenu et adapté à ce que le receveur peut utiliser;

👉 Suggérant plutôt que imposant.

➡️ Insérer un feedback correctif entre deux feedbacks positifs, accorder des temps dédiés pour permettre à l’étudiant ou l’étudiante d’exprimer son ressenti et ses besoins vis-à-vis du type de supervision proposé, etc.

➡️ Valoriser les efforts de l’étudiant ou l’étudiante tout en proposant des axes d’amélioration clairs, permettant d’instaurer un climat de confiance propice à l’apprentissage ; lui donner les moyens de progresser en lui suggérant par exemple des lectures et en lui permettant de mettre en pratique les habiletés cibles.

➡️ Avoir un niveau d’exigence respectant le rythme et les capacités de chacun et chacune.

➡️ S’assurer que les conditions actuelles extérieures au stage sont compatibles avec la bonne réalisation de certaines tâches comme la rédaction de CRBO ou la préparation des séances.

👉 Si la fonction est enrichissante, elle peut néanmoins s’accompagner parfois de difficultés. Parmi les freins les plus souvent évoqués :

➡️ Manque de temps pour encadrer et discuter avec l’étudiant et l’étudiante en dehors des séances, notamment lorsque l’étudiant ou l’étudiante est en difficulté ;
➡️ Charge mentale accrue ;
➡️ Sentiment d’un manque de légitimité pour accueillir des étudiants ou étudiantes ;
➡️ Besoin d’être accompagné·e, outillé·e, voire formé·e pour ce rôle de tuteur ou tutrice, particulièrement chez les nouveaux maîtres et nouvelles maîtresses de stage ;
➡️ Exercice en zone sous-dense, freinant l’accès des étudiants et étudiantes à ces lieux de stage.

Afin de valoriser l’engagement des maîtres et maîtresses de stage, une reconnaissance du statut de maître ou maîtresse de stage universitaire serait essentielle. Ce statut nécessiterait de se former à l’encadrement de stagiaire et permettrait d’être rémunéré.e pour cette fonction.

👉 Proposer des formations pédagogiques ciblées, telles que l’adaptation de son cadre thérapeutique à la présence d’un ou d’une stagiaire ;

👉Favoriser la communication entre maîtres ou maîtresses de stage au travers d’échanges structurés ;

👉Alléger la charge administrative en obtenant pour la profession le statut de maître ou maîtresse de stage universitaire

👉Le maître ou la maîtresse de stage est bien plus qu’un ou une tutrice : il ou elle est un pilier de la professionnalisation des futur·es orthophonistes. Sa mission exige des compétences cliniques, pédagogiques et humaines. Pour que cette expérience soit riche à la fois pour le ou la stagiaire et pour le professionnel ou la professionnelle, il est indispensable de soutenir les maîtres ou maîtresses de stage dans leur rôle, de valoriser leur engagement, et de promouvoir une culture de la bienveillance, de l’accompagnement et de la co-construction des savoirs. Ainsi, l’apprentissage en stage devient une aventure partagée, où chacun ou chacune grandit au contact de l’autre.

5-  Les maîtres et maîtresses de stage et les CFUO : un partenariat au coeur de la formation initiale

La formation initiale repose sur un équilibre entre l’apprentissage théorique dispensé à l’université et l’expérience pratique acquise sur le terrain. 
Les maîtresses et maîtres de stage, ainsi que les CFUO (Centres de Formation Universitaire en Orthophonie) jouent des rôles complémentaires et indissociables. Le lien entre ces deux acteurs est essentiel pour offrir aux étudiants ou étudiantes une formation cohérente, riche et adaptée aux réalités du métier.

👉 Les CFUO, qui permettent la transmission des savoirs, constituent également de véritables pôles de ressources pour les maîtresses et maîtres de stage. 

En effet, ceux-ci peuvent être invités à participer à des séminaires, des temps d’échange et de réflexion pédagogique, voire à des formations continues organisées par le CFUO. Ces espaces favorisent la mise en commun des expériences et permettent d’harmoniser les pratiques d’encadrement des étudiants ou étudiantes.

Au-delà de la simple coordination administrative, les CFUO peuvent être perçus comme des partenaires de soutien, disponibles pour répondre aux questions, apporter des outils et proposer des espaces de dialogue.

    👉 Certaines régions ont créé des associations de maîtresses ou maîtres de stage afin de pouvoir créer du lien entre professionnel·es, défendre leurs intérêts et valoriser leur engagement. Ces échanges permettent de mener des réflexions communes, en collaboration étroite avec les CFUO, en favorisant la circulation des informations et des bonnes pratiques.

    👉 En valorisant la place des CFUO comme alliés et facilitateurs, et en renforçant la collaboration avec les maîtres et maîtresses de stage, on construit un partenariat où chacun·e trouve sa place. Les étudiants ou étudiantes bénéficient ainsi d’un parcours de formation initiale riche, les maîtres ou maîtresses de stage se sentent soutenu·es et reconnu·es dans leurs missions, et les CFUO affirment leur rôle de pivot dans la formation universitaire en orthophonie.
    Ce lien de confiance et de coopération est la clé pour garantir une formation de qualité et, à terme, un accompagnement efficace des patients ou des patientes.

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