Après le salariat, l’installation, la CARPIMKO, la recherche et le doctorat puis la formation continue lors des éditions précédentes, cette semaine à travers 4 Ortho Focus, nous abordons le thème de l’exercice coordonné :
Nous souhaitons jouer un rôle clé à vos côtés, en défendant vos intérêts et en vous facilitant l’accès à l’information et à la formation nécessaire pour s’intégrer pleinement dans ces nouvelles structures de soins.
Ces nouvelles dynamiques placent l’orthophonie au centre d’un système de santé toujours plus coordonné et interprofessionnel.
Dans cette série d’Orthofocus, nous vous apportons des informations détaillées sur l’exercice coordonné structuré utiles à votre exercice pratique.
Les exercices coordonnés sont pluriels
Pour chacun·es de nos patient·es, nous veillons à envoyer notre compte-rendu de bilan au médecin prescripteur ou au médecin traitant, et quand c’est possible, nous le versons au Dossier Médical Partagé (DMP) du·de la patient·e.
C’est la première brique de la coordination, que nous revendiquons comme ancrée chez toutes et tous les orthophonistes. Experts de la communication et du langage, nous excellons dans l’art d’échanger avec les professionnels qui accompagnent nos patient·es
Malgré nos efforts pour organiser nos soins avec les autres professionnels de santé, de nombreux acronymes liés à la coordination sont apparus dans le milieu de la santé ces dernières années. MSP, CPTS, ESP, ESCAP, ils décrivent les diverses formes d’exercice coordonné structuré tels que prévus par le code de la santé publique. Ces mots résonnent de plus en plus dans les communications du Ministère de la Santé, de l’Assurance Maladie ou parfois de la FNO.
Les ESCAP (Équipes de Soins Coordonnées Autour du Patient)
Qui ?
Au moins trois professionnel·les de santé dont le médecin traitant identifié par le patient ou la patiente.
Quel cadre ?
Issues de la signature de l’avenant 1 à l’Accord Cadre Interprofessionnel négocié entre l’Union Nationale des Professionnelle de Santé, les ESCAP seront expérimentées pour 3 ans.
Le patient ou la patiente est intégré·e au sein du dispositif via une grille d’inclusion complétée par un·e des professionnel·les de santé, si les critères de besoins de prise en charge coordonnée sont remplis.
Quels financements ?
Forfait annuel de 100€ dès que le·a professionnel·le est impliqué·e dans 5 ESCAP ainsi qu’une aide forfaitaire de 100€ par an pour l’acquisition et l’utilisation d’un outil de communication commun défini.
Quelles missions ?
Coordonner les soins autour des besoins spécifiques du patient ou de la patiente afin de réduire les risques d’hospitalisation par exemple et favoriser un parcours de soins adapté. Le patient ou la patiente a le libre choix des professionnel·les de santé qui l’accompagnent.
Quelles obligations ?
Seuls les patient·es polypathologiques chroniques de plus de 65 ans, diabétiques sous insuline, ayant fait un AVC et ayant été hospitalisé·es ou en soins palliatifs peuvent faire l’objet d’une ESCAP à ce stade. Les échanges entre professionnel·les doivent se faire via une application partagée.
Les MSP (Maisons de Santé Pluriprofessionnelles)
Qui ?
Au moins deux médecins généralistes et un·e paramédical·e exerçant au sein d’un même lieu, même si des MSP multisites existent également.
Quel cadre ?
Création d’une SISA (Société Interprofessionnelle de Soins Ambulatoires) et élaboration d’un projet de santé. La MSP peut être créée au sein d’un même bâtiment, ou être multisites.
Quels financements ?
100 000€ de Fonds d’Intervention Régionale (FIR) par l’ Agence Régionale de Santé (ARS), puis des fonds annuels versés dans le cadre des Accords Conventionnels Interprofessionnels (ACI) MSP par la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM) en contrepartie du respect de certaines obligations.
Les fonds sont versés en fonction du respect des objectifs et du nombre de patients suivis par les médecins de la structure
Quelles missions ?
Renforcer l’accès aux soins, travailler en équipe et faciliter la coordination, développer des systèmes de prévention et de partage d’information.
Quelles obligations ?
La permanence et la continuité des soins (amplitude horaire de 8h à 20h en semaine ainsi que le samedi matin par les praticiens, un secrétariat physique ou téléphonique), effectuer des réunions de concertations régulières pour dialoguer au sujet des soins des patient·es en ALD, effectuer des missions de santé publique et de prévention, former des stagiaires et utiliser un outil commun de communication interne.
Les ESP (Équipes de soins primaires)
Qui ?
Au moins un·e médecin généraliste et un·e paramédical·e.
Quel cadre ?
Pas de cadre juridique, mais il faut fournir un projet de santé à l’ARS et avoir une structure pour recueillir le financement.
Quels financements ?
Une ESP peut prétendre à des subventions du FIR si elle est constituée en association ou si elle est interne à une MSP.
Quelles missions ?
Structurer le parcours de soins des patient·es et mieux se coordonner ; grâce à son projet de santé, l’ESP pourra effectuer davantage de prévention et réduire les inégalités sociales et territoriales en santé en favorisant des parcours de soins adaptés.
Quelles obligations ?
Favoriser l’accès aux soins, utiliser un système d’information partagé, coordonner les soins.
Les CPTS (Communautés Professionnelles Territoriales de Santé)
Qui ?
Tout·e professionnel·le de santé, les structures d’exercice coordonné, les établissements de santé et les hôpitaux de proximité, les structures médico-sociales et sociales ainsi que les dispositifs d’appui à la coordination.
Quel cadre ?
Association loi 1901 et un projet de santé
Quels financements?
Elles sont financées par l’ ACI CPTS, en fonction de la taille du bassin de vie concerné et de la validation de certains critères définis dans le projet de santé.
Quelles missions?
Améliorer l’accès aux soins, organiser les parcours pluri professionnels autour des patients, développer des actions territoriales de prévention et contribuer à apporter une réponse en cas de crise sanitaire.
Il s’agit d’une approche populationnelle, toutes les personnes résidant dans le territoire couvert sont concernés par le projet de santé. La CPTS n’a pas pour mission de coordonner le parcours d’un patient spécifique mais d’apporter des solutions de parcours de soins sur le territoire.
Quelles obligations?
Elle doit répondre à chacune des missions socles évoquées ci-dessus par des actions concrètes, comme mettre en place un système de recherche d’un médecin traitant pour les patients en ALD qui n’en ont pas dans le cadre de l’accès aux soins ou en finançant des actions de formation pluriprofessionnelle etc.
Retrouvez ici la carte de couverture sur le territoire
Les ESCAP et les ESP peuvent être complémentaires des autres formes d’exercice coordonné.
D’autres formes d’exercices coordonnés sont possibles, notamment dans les centres de santé ou les équipes de soins spécialisées.
Notre rôle dans ces exercices coordonnés
Ces dernières années, avec le déploiement des soins en ambulatoire (ou soins de ville), nos tutelles ont souhaité mettre l’accent sur la coordination entre les différent·es professionnel·les de santé, avec leurs patient·es. Alors que notre profession est depuis toujours engagée dans la transmission d’informations notamment avec la rédaction et l’envoi du compte-rendu de bilan, la volonté des instances de formaliser des procédures d’échanges, de communication entre professionnel·les de santé est apparue.
Si les raisons et motivations de cette volonté sont louables, il semble important de mesurer également les éventuels glissements, les effets de bords et les conséquences possibles à moyen terme. La prévention primaire, l’articulation entre les professionnel·les de santé ou la rationalisation des dépenses de santé sont autant de facteurs encourageants pour aller dans la voie de l’exercice coordonné dit structuré.
Mais les dépenses d’argent public liées aux CPTS ou aux MSP sont importantes et il convient de monitorer de près leur utilisation. Tout comme il est essentiel de s’assurer du bon respect de leurs missions par les CPTS, qui, dans certains cas, peuvent aboutir à un glissement dans les objectifs. Les membres des conseils d’administration (CA) et des bureaux ont cette responsabilité, les Agences régionales de santé (ARS) doivent, elles, contrôler.
Intégration arbitraire de certaines professions non conventionnées dans des parcours de soins forfaitisés, modules de formation continue, comité d’entreprise mis à disposition des professionnel·les, journées « d’intégration » indemnisées, les exemples ne manquent pas et nous appellent à garder notre vigilance.
De nombreuses orthophonistes jouent des rôles d’animation des CPTS et des MSP, au niveau des bureaux (plusieurs sont président·es de CPTS) ou au niveau des CA.
Quels postes pouvons-nous occuper en structures d’exercice coordonné ?
Tous les postes ! Les orthophonistes en fonction de leurs appétences peuvent proposer leur candidature comme membre du conseil d’administration, du bureau, président.e, gérant·e, coordinateur·trice, trésorier·ère ou tout autre poste disponible. Au moins deux CPTS ont pour présidente une orthophoniste !
Que peut-on faire concrètement dans ces structures d’exercice coordonné ?
Voici quelques témoignages :
« Ma CPTS a développé une procédure pour aider les patients en ALD à trouver un médecin traitant »
« Dans ma MSP, on a organisé une mission de santé publique auprès d’enfants de CM1 afin de les sensibiliser, autour d’ateliers, à l’hygiène, au harcèlement scolaire, à la surexposition aux écrans ou encore aux gestes d’urgence »
« On a fait le mois sans tabac et octobre rose »
« La CPTS a subventionné l’action de prévention dans les PMI « À vos jeux prêts parlez !»
« Toute l’équipe de la MSP est formée en gestes de premiers secours en santé mentale »
“On a édité un livret sur les TAP adressé à tous les MG”
“La CPTS va diffuser le livret bien vieillir à tous les adhérents”
“Je fais partie d’une ESP et j’ai donc pu mener une action de prévention sur le vieillissement cognitif pathologique dans mon bassin de vie avec le médecin”
“Nous avons des synthèses tous les jeudis soirs pour échanger sur les patients suivis par plusieurs d’entre nous dans la MSP”
“La CPTS finance une supervision pour les orthophonistes qui le souhaitent, à raison d’une fois tous les deux mois”
L’exercice coordonné permet de positionner l’orthophonie au cœur du système de santé et les orthophonistes comme des interlocuteurs et interlocutrices incontournables dans la prévention, la formation et les parcours de soins.
Au niveau local, cela permet également de renforcer la communication entre les professionnels et de soutenir les professionnel·les qui en ont besoin.
L’exercice coordonné et la validation du FAMI (Forfait d’aide à la modernisation et informatisation du cabinet professionnel)
Depuis 2022, vous bénéficiez d’ un forfait supplémentaire de 100 euros dans le cadre de l’exercice coordonné si vous remplissez ce critère du FAMI. 2022 et 2023 ont été des années dérogatoires, mais à partir de 2024, remplir ce critère d’exercice coordonné sera obligatoire pour toucher le FAMI, soit 590€.
Dès 2025, ces formations pourront également être finançables grâce au FIFPL.
Comment participer à une structure d’exercice coordonné ?
Vous pouvez en tant qu’orthophoniste être à l’initiative de la création de toutes les formes d’exercice coordonné.
Je souhaite participer à une structure déjà existante, comment faire ?
Évidemment, vous pouvez tout à fait rejoindre une structure d’exercice coordonné déjà existante: il faudra généralement vous rapprocher d’un·e coordinateur·rice de la structure ou d’un·e des professionnel·les y exerçant afin de connaître les modalités d’intégration définis par les statuts et/ou les règlements intérieurs.
Je souhaite créer une ESCAP, comment faire ?
La création de cet exercice coordonné se veut souple et simple. J’en discute avec le patient ou la patiente concerné·e si il ou elle rentre dans les critères définis par la grille d’inclusion. Je peux ensuite prendre contact avec le médecin traitant du patient ou de la patiente et les autres professionnel·les de santé qui seront nommé·es par le patient ou la patiente.
Je souhaite créer une ESP, comment faire ?
Je me rapproche d’un·e médecin généraliste de mon secteur avec qui je peux rédiger un projet de santé qui doit être validé par l’ARS laquelle qui proposera la signature d’un contrat pour concrétiser et financer cette coordination.
Je souhaite créer une MSP, comment faire ?
Je recherche au moins deux médecins et éventuellement d’autres professionnel·les de santé conventionné·es pour leur faire part de mon projet, faire un état des lieux de l’offre de soins et des besoins de santé spécifiques sur le territoire.
Si tout le monde est partant, nous pouvons rédiger un projet de santé qui sera le socle de notre volonté de travailler ensemble. Il sera ensuite examiné par une commission experte qui jugera si le projet est cohérent avec les priorités identifiées par l’ARS et accordera dès lors le label MSP.
Il suffira ensuite de créer une SISA, de choisir un système d’information partagé et de rédiger un règlement intérieur (Pour cela, n’hésitez pas à nous consulter si vous avez besoin de conseils).
Surtout, entourez-vous d’un·e coordinateur·rice pour le montage de la MSP : cela vous facilitera la vie et vous permettra de ne rien oublier afin de toucher la rémunération spécifique prévue par l’accord conventionnel interprofessionnel ( ACI) !
Pour permettre le financement du montage, un fonds d’intervention régional (FIR) de l’ARS peut être versé, sur envoi d’une simple lettre d’intention reprenant les besoins du territoire et les ambitions pour la MSP.
Je souhaite créer une CPTS, comment faire ?
Je contacte l’Agence régionale de santé (ARS) pour lui manifester mon envie de créer une CPTS sur mon territoire et je m’entoure d’autres professionnel·les pour rédiger une lettre d’intention permettant de mettre en avant les actions qui seront mises en place par la CPTS.
Pour cela, il faut connaître l’offre de soins, les besoins de santé spécifiques du territoire. L’ARS et la CPAM vous guideront et vous accompagneront pour cet aspect. Il vous frauda ensuite rédiger un projet de santé avec les autres acteurs et intégrer un bureau et/ou un conseil d’administration.
Pour permettre le financement du montage, un fonds FIR de l’ARS peut être versé, sur envoi d’une simple lettre d’intention reprenant les besoins du territoire et les ambitions pour la CPTS.
Accès direct et exercice coordonné : où ? quand ? comment ?
L’accès direct, c’est la possibilité de réaliser des actes sans prescription médicale. C’est la loi Rist, portant l’amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnel·les de santé qui a permis cet accès aux orthophonistes. Elle concerne tous et toutes les orthophonistes salarié·es mais également les orthophonistes exerçant en libéral dans le cadre des structures d’exercice coordonné.
Retrouvez le texte de loi ici
Si vous exercez au sein d’une MSP, d’un centre de santé, d’un établissement sanitaire, d’un établissement médico-social ou si vous faites partie d’une ESP, vous pouvez pratiquer sans réserve l’accès direct.
Il est également possible de pratiquer l’accès direct lorsque votre CPTS l’a inscrit au projet de santé. Si ce n’est pas encore le cas, il vous faut solliciter votre CPTS afin d’ajouter un avenant au projet de santé, sans restrictions. Il sera parfois nécessaire d’organiser une rencontre avec les autres professionnels de la CPTS afin d’expliquer les avantages de cette mesure et les conditions de son application.
Retrouvez l’argumentaire que vous pouvez soumettre à votre CPTS ici.
Quelles sont mes obligations si je réalise des soins en accès direct ?
Vous devez verser le compte rendu de bilan orthophonique (CRBO) dans le dossier médical partagé (DMP) (sauf opposition du patient ou de la patiente) et l’envoyer au médecin traitant.
Comment déposer un document dans le DMP ?
Il faut aller sur le site “dmp.fr” puis dans l’onglet “professionnel” puis sur “Accéder au Dmp”. Vous vous authentifiez grâce à votre carte Carte de professionnel de santé (CPS) puis vous pouvez chercher votre patient·e et accéder à son DMP pour ajouter des documents.
ATTENTION, il vous faut impérativement l’accord du·de la patient·e ou de son·sa représentant·e légal·e.
Comment facturer les soins réalisés en accès direct ?
- Renseigner votre propre nom et numéro de professionnel (numéro Adeli) de santé dans la case « Prescripteur » de la facture »;
- Il n’est pas nécessaire de télécharger de pièces justificatives dans votre logiciel de facturation dans la mesure où l’accès direct ne nécessite pas de prescription médicale préalable.
- Il est parfois nécessaire de “forcer” la facturation par le logiciel mais la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) accepte sans problème le paiement.
- Suite à un bilan de renouvellement, malgré l’absence de prescription, l’envoi d’une Demande d’accord préalable (DAP) reste nécessaire.
Retrouvez ici la Foire aux questions (FAQ) Accès direct
N’hésitez pas à nous écrire à contact@fno.fr pour toute question sur l’exercice coordonné !