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AccueilActualitésCadre législatifLe DIPA ou le paradoxe de l’aide de l’État

Le DIPA (Dispositif d’Indemnisation pour Perte d’Activité)
Ou le paradoxe de l’aide de l’État…

 

L’Assurance maladie a mis en place une aide exceptionnelle pour aider les professionnels libéraux à assumer leurs charges courantes alors que leur activité était considérablement diminuée ou nulle.

Cette initiative et ce dispositif, il est honnête de le souligner, furent historiques et ont confirmé le principe de solidarité, et de protection sociale de notre pays.

Le DIPA, dispositif élaboré dans l’urgence, comporte en première analyse un biais dans son intitulé.

En effet, les concertations en amont de sa mise en œuvre qui ont été faites auprès des organisations représentatives des professionnels de santé (la FNO pour les orthophonistes), avaient bien posé le cadre d’une aide pour le paiement des charges fixes durant la période de fermeture des cabinets libéraux, alors que l’intitulé introduit pourtant une notion « d’Activité ».

La FNO avait alors défendu et obtenu auprès de la Caisse un taux de charge moyen pour les cabinets d’orthophonie autour de 40 %.

La Caisse après l’audition de l’ensemble des professions de santé conventionnées, a procédé à l’élaboration d’un algorithme de calcul pour évaluer et proratiser ce ratio entre la diminution massive de l’activité et la valeur des charges sur une période donnée. La formule de calcul comportait une soustraction des autres aides perçues par les professionnels de santé.

La formule générique de calcul du  montant  de  l’aide  est  la suivante  :

[(Honoraires 2019  –  Honoraires 2020)  x Taux  de  charges  fixes]  après déduction des aides  reçues  par  ailleurs  (activité partielle, indemnités journalières,  fonds  de  solidarité)

Les orthophonistes ont pu procéder à leur déclaration en différentes périodes distinctes.

Le principe de précaution de la Caisse a été de n’attribuer que 80 % de la somme pour laquelle les professionnels de santé étaient éligibles au titre des modalités de calcul de ce dispositif ; il était déjà prévu et affiché qu’une régularisation serait faite (début 2021) en tenant compte de l’activité globale de 2020.

Tout était théoriquement réuni pour que ces aides exceptionnelles soient le reflet « pondéré » de l’impact de la perte d’activité. C’est dans ce sens que la FNO a communiqué auprès des orthophonistes, en présentant par ailleurs l’ensemble des aides auxquelles ils étaient éligibles.

La FNO avait, en outre, négocié pour que la totalité de la perte de revenu soit prise en compte dans le calcul y compris l’activité réalisée (honoraires sur la base des tarifs conventionnés) dans le cadre de conventions avec des structures de type ESMS (cf Avenant 14 à la convention des orthophonistes).

Cette anomalie avait été corrigée par la caisse uniquement lors de la deuxième période de déclaration ; un défaut qui peut avoir un impact pour certains cabinets sur le calcul de la première période.

 

Aide, avance ou erreur ?

Après une longue phase d’attente, certains orthophonistes ont pu bénéficier du maintien de l’aide voire du complément prévu initialement mais de nombreux collègues se voient réclamer des demandes de remboursement.

Les premiers chiffres qui sont remontés par la CNAM et par l’ensemble des professions de santé conventionnés font état d’une situation qui interpelle :

  • Une large majorité des professionnels se retrouvent en situation de « remboursement » de tout ou partie de ces sommes, alors que le système était conçu pour pondérer ces versements et a minima solder les comptes ou verser un complément.
  • Comment le système de calcul a-t-il pu aboutir à une surévaluation systématique de l’aide ?
  • Par ailleurs ces sommes allouées ont été déclarées dans le relevé d’activité du professionnel ; elles ont entrainé une augmentation du paiement des cotisations sociales et ont été fiscalisées. Le remboursement de ces sommes n’entraînera pas de compensation fiscale équivalente l’année suivante.

Alors oui, ce dispositif basé sur un principe initial de solidarité nous amène à faire un constat bien amer sur le fond et sur la forme.

Sur le fond, une période difficile où tout un chacun (et particulièrement les professionnels de santé) a été acteur dans la lutte contre cette pandémie mondiale, il est bien anormal de devoir rembourser une aide avec un effet rétroactif, ceci sans explication claire sur le système de calcul qui a conduit à cette incohérence.

D’aucuns diront que les règles avaient été définies dès le départ …oui des règles mais qui finalement ne sont ni très lisibles, ni transparentes !

Quand ces « erreurs » concernent plus de la moitié des professionnels de santé …l’anomalie paraît évidente. Des explications doivent être apportées par les tutelles. La reprise globale de l’activité des cabinets entre juillet 2020 et décembre 2020 ne semble pas pouvoir expliquer un tel différentiel.

Sur la forme, la récupération de ces sommes par les Caisses prend le nom « d’indus » mais beaucoup d’orthophonistes se voient imposer un remboursement qui risque, dans cette période difficile, d’impacter le fragile équilibre économique des cabinets. La FNO déplore et dénonce que dans une telle situation, toutes les facilités et les modalités de règlement ne soient pas proposées.

 

Alors que faire ?

La FNO a soulevé l’ensemble de ces questions auprès du Directeur de l’Assurance maladie lors de son dernier conseil d’administration et elle l’a rappelé aux équipes de la CNAM.

Des démarches interprofessionnelles sont entreprises afin de demander officiellement à la CNAM et aux instances de tutelles (DSS, …) des éclaircissements profession par profession sur ces anomalies constatées et une solution pour atténuer cette situation.

Si les courriers de récupération n’en font pas mention, les orthophonistes doivent réclamer auprès de leur caisse que leur déclaration initiale et le mode de calcul effectué leur soient communiqués par écrit.

La transparence des modalités de calcul permettra à la FNO et ses syndicats régionaux de défendre chaque orthophoniste qui se sera vu réclamer des indus de manière injustifiée.

Il est important que tous les orthophonistes concernés par les demandes d’indus qu’ils estiment litigieuses après vérification (adhérents ou non adhérents) se fassent connaitre auprès de leur syndicat régional. Les représentants régionaux, en charge de la vie conventionnelle, pourront ainsi examiner et défendre chaque dossier, si besoin.